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Placer l’humain au centre de l’économie

Placer l’humain au centre de l’économie

Grâce à l’intelligence collective et à la gouvernance partagée ?

« Réconcilier la philosophie et l’économie », tel pourrait être le résumé du livre d’Yvan Falys, « Lettre ouverte à un jeune qui rêve d’être (anti) capitaliste, manifeste pour une philosophie de l’économie ». 

Rencontre avec l’auteur

Yvan Falys, comment en êtes-vous arrivé à écrire ce premier livre mixant l’économie et la philosophie, sur fond de 12 questions ? 

Je suis aujourd’hui professeur dans le secondaire – de gestion et d’économie – et des discussions, que ce soit avec des jeunes ou des collègues, m’ont poussé à écrire ce livre. Lorsqu’on enseigne, on est incité à étudier plus profondément les théories que l’on transmet. Cela m’a incité à imaginer une économie « autrement ». 

Pour moi, il y a une urgence à se réapproprier et à penser l’économie par soi-même. On laisse souvent les questions économiques à des experts, mais c’est une erreur. 

L’économie a un impact sur une foule de choses : notamment le réchauffement climatique, et donc notre survie. C’est une hérésie de penser que nous ne sommes pas capables de penser l’économie : au fond, c’est quelque chose de très simple… 

Vous avez fait montre d’une grande curiosité au fil de votre parcours, que ce soit au niveau de vos études ou de votre vie professionnelle…

Oui, tout à fait… J’ai cumulé plusieurs diplômes afin de m’ouvrir à de plus larges horizons : notamment en économie, en économie européenne, en droit, en droit international, en philosophie, en slavistique russe… 

Mon CV montre que je suis un touche-à-tout, y compris dans mon parcours professionnel. J’ai commencé dans une banque américaine, avant de poursuivre dans une boîte de softwares où je m’occupais de la gestion de portefeuilles. Ensuite, j’ai travaillé dix ans dans une maison d’édition pour enfants où j’étais responsable des droits internationaux. Après une restructuration, j’ai passé une agrégation pour devenir prof, un métier que j’adore et que j’exerce toujours aujourd’hui…

Comment avez-vous eu l’idée d’associer l’économie et la philosophie dans votre ouvrage ?

C’est parce que pour moi, la meilleure façon de penser l’économie est de la penser à travers la question philosophique… J’essaie d’être très didactique dans ce livre… J’aborde notamment la question du pouvoir des mots :
ont-ils un sens, un pouvoir « magique » sur le réel ? 

Prenons un exemple concret : si l’on veut contrer l’ultralibéralisme, on est tout de suite désigné comme étant « anticapitaliste ». Or, si on analyse le poids des mots, on réalise rapidement que ce n’est pas du tout la réalité. 

En effet, on peut s’opposer aux dérives du libéralisme, mais sans pour autant s’opposer à ses qualités.

La vraie philosophie du libéralisme est souvent à l’opposé de l’ultralibéralisme. Je pense qu’avant de se pencher sur les maux de l’économie, il faut se pencher sur ses mots… 

Y a-t-il pour vous une perte de sens au niveau économique ?

Oui, tout à fait ! Lorsque j’écoute les débats économiques, je réalise que l’on parle sans cesse de recettes… Mais que l’on ne donne pas de sens aux décisions qui sont prises.
J’ai toujours été surpris qu’il n’existe pas, non plus, de comité d’éthique au niveau économique, alors qu’il y en a dans le domaine de la bioéthique, du génome, etc. 

Ce qui amène notamment à la question que je pose dans le livre, parmi d’autres, « En économie, la fin justifie-t-elle toujours les moyens ? », ou encore, « En économie, seul ce qui ne dure pas a-t-il vraiment de la valeur ? » Cette question nous ramène aux dirigeants qui prennent des décisions pour s’enrichir très vite alors que ces mêmes décisions vont mettre la planète en péril à long terme… 

Quelles sont les autres questions clés que vous abordez dans cet ouvrage ?

Je pose notamment la question de l’œuf ou la poule : « Est-ce la façon dont on pense qui va changer le monde ou est-ce que ce sont les évolutions technologiques qui nous poussent à penser le monde ? » Ou encore la question de la liberté :
« La liberté commence-t-elle là où commence le profit de l’autre ? » On peut notamment penser ici à l’endettement : sommes-nous aujourd’hui libres de ne pas nous endetter ?
À moins d’être né très riche, c’est quasiment impossible. 

Et que dire des étudiants américains qui s’endettent de plusieurs dizaines de milliers de dollars pour pouvoir étudier ? Autres questions posées à travers l’ouvrage et qui sont prétextes à philosopher : « L’économie de l’innovation est-elle créatrice de bonheur ? », « Au XXIe siècle, les États peuvent-ils mener une politique économique ? » On pense ici aux multinationales qui se comportent comme des États dans l’État sous l’impulsion des lobbys, etc. Et encore, « En économie, le désir est-il la condition de la liberté ou son aliénation ? » 

À qui vous adressez-vous ?

À tout le monde, mais plus particulièrement aux jeunes, aux personnes un peu perdues, et à tous ceux qui seraient tentés de succomber à l’anticapitalisme. Je pense que ce n’est pas la solution idéale, car le libéralisme tel qu’il est pratiqué aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec le « vrai » libéralisme. 

Je m’adresse donc aux jeunes, c’est-à-dire à des personnes qui continuent à poser des questions, qui n’ont pas de certitudes… Pour moi, on est vieux le jour où on dit « je sais » (rires). 

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